Semaine du 9 février – en attendant la St-Valentin, dites-le avec un livre…
Si vous caressez l’idée de le lui dire, dites-le avec un livre. C’est ce que nous vous avons préparé chez Nath & compagnie : une sélection de livres coquins pour partager avec votre valentin ou votre valentine… ou les deux. Pour parler de littérature érotique, on a souvent utilisé l’expression : «Ces livres qu’on ne lit que d’une main». Puis-je vous conseiller de les lire à quatre mains?
Des très nombreux livres en librairie, j’attirerai aujourd’hui votre attention sur deux créatrices exceptionnelles.
Anne Archet (dernier titre paru : Perdre haleine : phrase autoérotique, Éditions du remue-ménage, 17,95$).
«Le sexe et le bon goût ne font pas bon ménage. Tout est dans l’art d’être sublimement et divinement vulgaire.» (Le carnet écarlate, p.75)
Définition : «Avoir un bon coup d’(Anne) archet» : écrire avec brio». Chez les Lépidoptères, l’archet désigne la partie excitatrice de l’appareil stridulant.
Anne Archet cultive l’anonymat comme d’autres cultivent les aventures; Anne Archet est une graphomane impunie qui ne demande qu’à l’être; Anne Archet est la plus discrète des auteur-re-trice* qui soit (trois livres papier publiés depuis 2014), mais chaque opus est un coup de maître si bien qu’on peut dire qu’Anne Archet n’est rien de moins que la maîtresse hors pair de la littérature érotique au Québec – là et dans le petit vaste monde que je connais. C’est la digne descendante de Pierre Louÿs dont elle ne peut envier l’érudition ou l’humour puisqu’elle possède ces deux qualités rares qui font toute la marque de l’intelligence. Aucune plume, quant à moi, ne peut rivaliser avec sa verve, son éloquence, son impertinence et cette capacité, au final (on parle d’érotisme, ne l’oublions pas) d’exciter en nous ce désir irrésistible de lubricité.
Anne Archet décoche ses flèches mieux que quiconque et si l’anarchie de ses propos et de ses dévergondages vous atteint en plein cœur, c’est que vous aurez compris que la littérature érotique est d’abord et avant tout une expérience corporelle aussi sensuelle qu’intellectuelle.
Sur un site consacré aux livres, le nom d’Anne Archet voisine ceux d’Esparbec (le grand pornocrate français qui vient de nous quitter) et d’Élisée Reclus (le grand penseur et écrivain anarchiste du XIXe siècle). Cette cohabitation n’est pas gratuite et traduit bien ses grandes passions : l’érotisme (que certains appellent, pornographie) et la vie de la Cité (que certains appellent, politique). Au final, le lecteur aura compris qu’Anne Archet aime la vie, les hommes, les femmes et le vivant. Il comprendra aussi que pour lire un portrait honnête de cette honnête femme, il convient de lire ce qu’elle écrit, car elle écrit bien mieux que je ne saurais le faire sur elle-même.
Anne Archet sévit sur papier aussi bien que sur le Web, toujours avec la même élégance et un amour indéfectible de la langue et de la littérature et séduit les hommes aussi bien que les femmes, mais au-delà de la forme et des genres et quel que soit le support, elle est toujours insupportable à force d’être sublime (dans l’au-delà et le très-bas). Que vous lisiez à une main, deux doigts, trois yeux ou quatre mains, je vous laisse libre d’en juger, mais je vous préviens : si vous vous y plongez, vous n’en sortirai pas indemne et je pari que votre désir de vous y noyer sera à la mesure de son immense talent. De grâce, ne passez pas à côté de cette expérience sensorielle et littéraire. Dans l’un ou l’autre de ses trois titres déjà publiés, nul doute qu’elle saura faire vibrer en vous une corde sensible de votre appareil stridulant.
* Désolé, avec la nouvelle orthographe du PC, j’en perds mon latin à ne plus savoir comment épeler un chat, une chatte.
Maria Hesse, Le plaisir, Éditions Presque Lune, 39,95$
«Passer du sexe par amour au sexe par plaisir, séparer l’émotionnel du physique pour finir par comprendre que le plaisir suprême, c’est de parvenir à réunir les deux.» (p. 147)
En attendant que sa biographie de Marilyn Monroe n’arrive sur nos tablettes (prévue à la fin de ce mois), et après ses biographies sur Frida Kahlo et David Bowie, Maria Hesse, cette illustratrice espagnole exceptionnelle, nous a offert un superbe et très intime album, sobrement intitulé, Le plaisir.
De quoi s’agit-il? De la découverte du plaisir que Maria Hesse nous narre à travers des figures féminines historiques, mythiques et littéraires (de Lilith à Madona en passant par Sapho, Anaïs Nin, Hedy Lamarr ou Colette), étroitement emmêlées à ses propres expériences et rencontres humaines. C’est un parcours, une enquête et une confession relatant sa découverte du plaisir en général, et du plaisir sexuel en particulier. On y traverse allègrement, librement et joyeusement, culpabilité, honte, ignorance et déni pour arriver à cette ouverture où la conduit sa propre curiosité et son désir de quitter l’ignorance et les préjugés.
Un livre à lire pour ceux et celles qui aimeraient partager leur sexualité avec les femmes.